Histoire de l’école de Paris

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jeudi 18 juin 2015

L’Institut Coppet donne un extrait du livre de Michel Leter consacré à l’histoire du libéralisme en Europe.

Extrait de Histoire du libéralisme en Europe, chapitre 10, Éléments pour une étude de l’école de Paris (1803-1852), p. 429 et suivantes, PUF, 2006.

Cet article entend souligner l’importance dans l’histoire du libéralisme français de ce que je propose d’appeler l’« École de Paris ». Cette famille intellectuelle s’inscrit dans l’héritage révolutionnaire du parti constitutionnel incarné par Benjamin Constant, « libéral en tout », et dont l’un des principaux précurseurs fut Jean-Baptiste Say.

Héritière indirecte, par les Idéologues, de l’école des « économistes » (dite « physiocratique ») du XVIIIe siècle, l’école de Paris a rassemblé les publicistes qui, sous la monarchie de Juillet, sont restés fidèles à la philosophie libérale alors que triomphait la lecture doctrinaire de la Charte de 1830 et que les ministères orléanistes, portés au pouvoir par une révolution libérale, s’étaient figés peu à peu dans les camps conservateur en politique et protectionniste en économie.

L’école de Paris va se cristalliser, hors de l’Université, autour du Journal des économistes, fondé en 1841, et de la Société d’économie politique, fondée en 1842. À compter de cette dernière date, elle sera le fer de lance de l’opposition libérale, essentiellement républicaine, qui grandira face au conservatisme institutionnel désormais incarné par Guizot – et luttera contre le lobby protectionniste, dont Thiers prend la tête à la Chambre dans les années 1840, et également contre le prétendu intérêt national de la colonisation de l’Algérie défendue par Tocqueville. Elle sera la seule force intellectuelle à combattre rationnellement les doctrines qui, après l’impensable effondrement de février 1848, alimenteront pour la première fois un socialisme d’État. Ainsi, soixante­-dix ans avant von Mises et l’école autrichienne, l’école de Paris sera la première communauté de savoir qui étudiera in vivo l’expérimentation socialiste qui allait conduire aux tragédies totalitaires du XXe siècle.

Engagés en politique, par vocation ou par devoir, les membres de l’école ont exercé pleinement les mandats qui leur ont été confiés par le peuple au sein des premières Assemblées des IIe et IIIe Républiques. Dans l’intervalle entre les deux Républiques, grâce au magistère moral que leur avaient acquis tant leurs travaux scientifiques que leur action civique, ils auront infléchi le cours de l’Empire, puisque c’est largement à eux qu’est dû l’infléchissement de la politique impériale au tournant de 1860 (même si les membres n’ont jamais partagé à ce sujet les illusions d’un Prévost-Paradol sur l’ « Empire libéral », illusions qui conduiront cette personnalité à se suicider).

Une fois la République restaurée, les dernières grandes figures du libéralisme parlementaire et gouvernemental, Michel Chevalier, Louis Wolowski, Édouard Laboulaye, Léon Say ou Yves Guyot, trouveront encore le moyen de retarder l’inéluctable domination des démagogues du courant nationaliste et colonialiste qui, sous couleur de « laïcité républicaine », et cultivant dans le domaine économique un esprit de monopole et de protection, conduiront le pays à la « Revanche » de 1914.

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