Non à l’abolition de la corvée

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jeudi 5 décembre 2019

La grève à la SNCF fait immanquablement penser à la lutte du Parlement de Paris contre Turgot alors que celui-ci avait la velléité de mettre un terme à la corvée. Le Parlement fit de solennelles remontrances au roi pour expliquer à quel point l’existence de ce privilège était absolument nécessaire au bon fonctionnement de la société. Cette réponse mérite d’être citée in extenso. (C’est moi qui surligne)

Le Parlement de Paris adresse au roi, le 4 mars, de solennelles remontrances.

Tout système qui, sous une apparence d’humanité et de bienfaisance, tendrait, dans une monarchie bien ordonnée, à établir entre les hommes une égalité de devoirs et à détruire les distinctions nécessaires, amènerait bientôt le désordre, suite inévitable de l’égalité absolue, et produirait le renversement de la société. C’est là une question d’État, et une des plus importantes, puisqu’il s’agit de savoir si tous vos sujets peuvent et doivent être confondus, s’il faut cesser d’admettre parmi eux des conditions différentes, des rangs, des titres, des prééminences.
Le Noble consacre son sang à la défense de l’État et assiste de ses conseils le souverain.
La dernière classe de la nation, qui ne peut rendre à l’État des services aussi distingués, s’acquitte envers lui par les tributs, l’industrie et les travaux corporels.

La noblesse défend son privilège par l’argument de l’impôt du sang : puisque nous contribuons à défendre l’État par notre participation à la guerre, nous n’avons pas à payer l’impôt fiduciaire qui sert à entretenir l’armée. L’argument pouvait encore tenir au XVIIe siècle, quand une bonne partie de la noblesse était effectivement dans l’armée, mais plus du tout au XVIIIe siècle. Le plus triste dans l’affaire, c’est que le peuple a suivi le Parlement et s’est lui aussi opposé à l’abrogation de la corvée, empêchant ainsi Louis XVI d’accomplir ce que les historiens nomment « la révolution royale ».

Les cheminots de la SNCF pourraient sortir le même argument : nous qui rendons des services aussi distingués au pays, nous devons avoir des privilèges : travailler moins et gagner plus. Et parmi les Français victimes des grèves, un bon nombre sera offusqué si jamais le gouvernement venait à proposer la libre concurrence du transport ferroviaire. Deux rappels d’histoire économique s’imposent donc, celui de l’histoire du train et celui de l’histoire des retraites, et une projection de futur économique.

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