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vendredi 26 octobre 2018
Lors de sa nomination comme ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer a suscité beaucoup d’espoir. Un an et demi après, ses réformes semblent pourtant au point mort. Pourquoi ? Après le désastreux bilan du quinquennat Hollande où le poste avait été occupé par trois ministres idéologues et peu au fait du sujet, l’arrivée de Jean-Michel Blanquer était une bonne nouvelle. Beaucoup plus pragmatique et ouvert, connaissant parfaitement la machine Éducation nationale, il faisait partie des bonnes nominations d’Emmanuel Macron.
Au-delà des mesures cosmétiques, il a mis en place deux chantiers majeurs : la réforme d’APB et le nouveau lycée. La première s’avère une impasse. APB a été rebaptisé Parcoursup, sans que rien de fondamental ne soit modifié, sauf le nom. Le ministre de l’Enseignement supérieur a annoncé en septembre qu’un ordre des vœux serait rétabli, comme sur APB. C’est donc un coup dans l’eau.
La réforme du lycée ne fait pas encore parler d’elle, parce qu’elle a été noyée dans la réforme du baccalauréat. C’est une mèche lente, qui va faire surgir des tensions dans les semaines à venir. Déjà, les fuites quant aux réformes des programmes ont suscité beaucoup d’amertume. Forcément serait-on tenté de dire : on ne peut pas faire un programme applicable partout et pour tous et qui satisfasse tout le monde. C’est le gros problème des monopoles centralisés.
Violences : rien à faire
Le mouvement #Pasdevague qui a touché le monde enseignant cette semaine est lui aussi emblématique. On ne peut pas imputer au ministre actuel la responsabilité de la violence qui sévit dans les établissements depuis une quinzaine d’années. Croire qu’il peut résoudre ce problème en quelques mois est aussi d’une grande naïveté. Sur ce dossier, le ministre ne peut rien faire. La violence à l’école est la continuité de la violence dans les territoires tenus par les narcotrafiquants. Elle est aussi le résultat de trente ans de délire pédagogiste qui a considéré que les sanctions étaient une mauvaise chose, qu’il ne fallait pas traumatiser les élèves et que tout le monde devait aller à l’école, y compris ceux qui ne savent pas quoi y faire. Indépendamment de ses qualités, Jean-Michel Blanquer ne pourra pas résoudre ce problème qui dépasse largement sa personne et l’institution scolaire.
La question posée est donc la suivante : que peut faire un ministre de l’Éducation nationale ? Réponse : peu de choses, voire presque rien. Ce n’est pas lui qui décide, c’est l’administration. C’est elle qui, de la rue de Grenelles aux établissements de province tient l’école en France. J’interrogeais ainsi un formateur d’ESPE quelques mois après la nomination de JM Blanquer pour savoir ce qu’il en pensait. Sa réponse fut nette : « Je n’en pense rien. Le ministre ne sert à rien. C’est nous qui avons le pouvoir et nous ferons ce que nous voudrons. »
La réforme du lycée est symptomatique de cet état de fait. Elle était déjà prévue par Najat Belkacem. Après la réforme du primaire par Vincent Peillon et celle du collège par NVB devait forcément suivre la réforme du lycée. François Hollande l’avait par ailleurs annoncée courant 2016. Ce que fera Jean-Michel Blanquer sur le lycée ne sera pas très différent de ce qu’aurait fait une autre personne ministre. Ce sont les inspecteurs et les multiples commissions qui dirigent le ministère. Cela rappelle ce qu’évoquait déjà Alexis de Tocqueville dès 1830 : les dictatures modernes seront celles des administrations.
Il n’y a donc rien à faire. Ceux qui le peuvent encore doivent quitter l’éducation nationale afin d’éviter la violence qui ne fera que s’accroître. Le message semble compris puisqu’ils sont de moins en moins nombreux à passer les concours de recrutement et qu’il y a de plus en plus de postes non pourvus. Le mouvement #Pasdevague risque d’amplifier le phénomène.
La solution, les libéraux la connaissent : la fin du monopole et l’établissement de la liberté scolaire via le chèque éducation. Mais comme pour l’instant personne ne remet en cause le monopole scolaire, il n’y a décidément rien à faire. Dommage : face à un quinquennat qui coule, Emmanuel Macron pourrait être un grand réformateur et laisser une trace positive en ouvrant le chantier de la liberté scolaire.
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