Contrepoints : Macron à l’ONU, un discours pour rien

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vendredi 28 septembre 2018

C’est face à une salle assez vide qu’Emmanuel Macron a délivré un discours de quarante-cinq minutes à l’ONU, une enceinte ou des milliers de chefs d’État ont défilé et qui n’a que très peu de prise sur le cours de la diplomatie mondiale. Dans un discours lourd, souvent incompréhensible, à la hauteur de sa pensée complexe qui est le reflet de l’écriture absconse de Paul Ricoeur, Emmanuel Macron a délivré sa vision du monde, qui est celle du chef d’État d’une puissance faible. En appeler au multilatéralisme contre l’unilatéralisme n’a rien de nouveau. Il visait Donald Trump, sans le nommer, qui avait parlé un peu avant lui. On était très loin des embrassades de la visite d’État à Washington. Taper sur Trump n’est pas nécessairement une marque de courage. C’est une manière de se situer dans le camp du Bien. En appeler au multilatéralisme est la stratégie des puissances faibles et petites, qui n’ont pas d’autres choix pour peser sur la scène mondiale. Pas sûr que la Chine, la Russie et les États-Unis s’intéressent à cela.

C’est surtout le discours d’un chef d’État sans vision et sans stratégie. Il y aurait pourtant beaucoup à dire, et surtout à faire. Le Pacifique, par exemple, où la France est présente et qui est une zone hautement stratégique. Il faudrait davantage parler de la Nouvelle-Calédonie et de sa place dans la puissance française. De la Syrie aussi, où la France s’est isolée alors qu’elle était centrale. Face aux vagues migratoires. L’accueil certes, mais les peuples sentent bien que ce n’est plus la solution. Macron était le chouchou de l’Europe. Le voilà devancé par Matteo Salvini et le chancelier Kurz. Il est désormais asphyxié dans le continent qui devait être sa gloire. Alors il lui reste la tribune de l’ONU, comme un acteur qui veut se persuader qu’il a encore du talent.

Mais l’ONU n’intéresse pas grand monde et n’a pas beaucoup de pouvoir. Sa bureaucratie est ravie d’être mise sur le devant de la scène, mais son secrétaire général est invité plus par politesse que par obligation. C’est peut-être cela, le plus cruel, pour Emmanuel Macron. Les projecteurs ne le regardent plus. La lumière n’imprime plus. D’autres rock stars de la scène politique lui ont volé la vedette. Emmanuel Macron a prononcé l’éloge funèbre de Johnny Hallyday. Le chanteur avait réussi à durer face à tous ceux de sa génération et plus encore. Pour Macron, il semble n’avoir été que le président d’un été. Son regard figé et inquiet à la fin du discours est celui d’un comédien qui regarde dans les yeux de l’autre s’il existe encore. Le plus cruel pour lui est que son discours à l’ONU n’intéresse plus grand monde.

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