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dimanche 15 janvier 2017
Dans mon livre Histoire du Vin et de l’Eglise j’ai démontré que les vignobles français et européens avaient une origine ecclésiale. Le porto n’était que peu évoqué, voici quelques compléments d’informations issus des recherches d’Antonio Barros Cardoso sur « Les vins du Douro et les maisons religieuses de Porto au XVIIIe siècle » dans Faire vivre le terroir, sous la direction de Jean-Claude Hinnewinkel, Presses Universitaires de Bordeaux, 2010.
L’auteur rappelle que le clergé a reçu des donations de terres dans la région du Douro, ce fleuve à flanc de coteaux qui se jette dans l’océan à hauteur de Porto. Les ordres ont ensuite cherché à valoriser ces terres afin d’en tirer un bénéfice et ils se sont tournés vers le vin, parce qu’ils en maîtrisaient le savoir-faire, que la région était propice à la viticulture et que le marché était conséquent.
Le résultat est qu’au XVIIe siècle les Jésuites de Porto produisent 60 à 70 tonneaux de vin. Les Bénédictins, les Oratoriens, ainsi que l’évêque de Porto, possèdent aussi leurs vignes. Assez rapidement leurs vins sont plus réputés que celui des autres vignerons, si bien qu’ils sont vendus plus chers, selon un schéma classique démontré dans Histoire du Vin et de l’Eglise.
Leur renommé est telle que tous les vins entrant dans Porto sont taxés, sauf ceux destinés aux religieux et consommés dans leurs maisons. On se doute que cette exemption fiscale a été détournée pour des usages extérieurs aux moines. Comme le note l’auteur : « La consommation de vins dans les monastères et couvents de Porto du XVIIIe siècle, en certains cas, allait bien au-delà des nécessités de leur utilisation dans les actes liturgiques. » (page 103).
Les Jésuites possèdent, au XVIIe siècle, une des plus grandes fermes du Douro et leurs vins sont de qualité supérieure. Quand les commerçants anglais se rendent à Porto pour y trouver du vin pour leurs marchés c’est eux, avec l’aide des Anglais, qui ont initié le passage du vin rouge du Douro au vin muté –le porto- que nous connaissons aujourd’hui. Puis les négociants anglais ont pris les rênes du marché et ont contrôlé la production des vignerons paysans, avant que le marquis de Pombal en 1759, alors qu’il était Premier ministre, a créé un organisme étatique de gestion du porto.
Voilà comment ici aussi nous trouvons des traces ecclésiales à l’origine du vignoble du Douro, un vignoble qui, comme Saint-Emilion, est classé au patrimoine mondial de l’humanité. Et comme l’écrit l’auteur lui-même : « L’histoire des vins de Porto ne peut-être dissociée des clergés réguliers et séculiers installés dans la ville. » (page 91).
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