Vous êtes ici : Accueil > Articles > L’Incorrect. Le libéralisme : une pensée française
lundi 11 février 2019
La France n’a pas toujours été une « URSS qui a réussi » selon le mot de Jacques Marseille, un paradis socialiste où la droite et la gauche partagent la même passion pour l’étatisme. Alors que l’on associe le libéralisme au monde anglo-saxon, c’est en France qu’est née cette philosophie du droit. Attachés à la propriété privée, à la liberté des écoles et de la presse, à la subsidiarité et à la libre association, les libéraux ont su conduire des politiques. Durant la Monarchie de Juillet (1830-1848) d’une part, qui voit l’école française d’économie politique occuper les principaux postes de gouvernement et un Louis-Philippe soucieux de réconciliation nationale, de prospérité et de grandeur de la France.
La IIIe République éteint cette fibre libérale. C’est d’abord la nationalisation de l’école par Jules Ferry, puis ensuite la nationalisation des biens de l’Église (1906), qui est une grande attaque contre la propriété privée, et l’expulsion des congrégations religieuses ; enfin, les premières nationalisations d’entreprises durant les années 1930. Jacques Rueff fut l’un des rares à oser se dire libéral. Il sauva l’économie française à trois reprises : en 1926-1928 avec Raymond Poincaré, en 1938 avec Paul Raynaud et en 1958-1960 avec le Général de Gaulle. À chaque fois, il rétablit la vigueur de la monnaie et il permit l’assainissement des finances publiques. Son action en 1958 est décisive.
À une France ruinée et surendettée, contrainte de vivre des subsides mensuels accordées par Washington, Rueff fit faire les réformes sociales et économiques indispensables à son redressement. Pompidou a été l’autre grand artisan d’une politique libérale, accordant davantage de liberté aux entrepreneurs et desserrant la mainmise de l’administration. Mais aucun n’est parvenu à mettre un terme à l’adoration de l’État-providence pour le remplacer par un État-subsidiaire. C’est le groupe de pensée X-crise qui a dressé les premiers plans de l’État-providence, dans les années 1930. Un bon nombre d’entre eux se sont ensuite retrouvés au gouvernement du Maréchal Pétain où ils ont mis en place les premiers piliers de la sécurité sociale et de la retraite par répartition. Interrompu en 1942, ce programme est repris en 1945-46, une fois les communistes arrivés au pouvoir. Curieux donc de voir la droite défendre aujourd’hui un système social né de la double filiation de Vichy et du communisme, oubliant les combats d’un Mgr Frepel pour la liberté scolaire ; de Poincaré et de Tardieu pour la liberté d’association des mutuelles et des travailleurs.
La confusion entre patriotisme et étatisme fait croire encore à l’État stratège, alors que tous les fleurons industriels français sont le fait d’entrepreneurs privés et que toutes les entreprises publiques ont fait faillite, non à cause de la mondialisation mais de leur mauvaise gestion. Une adoration qui a la vie longue chez une droite qui parle d’histoire et de racines, mais qui a oublié l’histoire de son propre pays et qui renie les racines politiques et intellectuelles de sa famille de pensée.
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