Terroir et guerre du goût 2/2

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jeudi 6 septembre 2012

III/ Typologie du goût

La typologie du goût mise en place par Franck Dubourdieu grandit fortement la compréhension que l’on peut avoir du vin. Elle a le mérite d’être simple à comprendre, d’être applicable à tous les vins, et de donner des guides utiles pour apprécier les produits consommés.

Dubourdieu définit 3 types de goûts :
Un goût insuffisant, un goût excessif et un goût classique, intermédiaire entre les deux. Le grand goût du vin c’est le goût classique, c’est l’esthétique. Le goût du vin de terroir c’est l’esthétique, un goût qui se trouve à équidistance du manque et de l’excès.

J’aime beaucoup cet usage de l’esthétique pour définir un grand vin, un vin aimable et recherché. Un Beaujolais gouleyant et fruité peut être esthétique, aussi bien qu’un majestueux sauternes, voluptueux et charnel. L’esthétique n’est pas une définition, mais une sensation, un plaisir, qui peut s’appliquer à tous les types de vin, à toutes les régions, en fonction de leurs caractéristiques propres.

Les vins insuffisants sont ceux qui manquent de corps, de chair, de saveur ou de densité. Ce sont des vins fades et ternes.
Les vins excessifs sont ceux que l’on a forcés, à coup de micro-bullage, de copeaux de chêne, de bâtonnage, pour leur donner un goût fort, puissant et doux, afin de séduire les palais immatures et les jurés des concours.

Le grand vin, le vin classique, est entre les deux : sans manque et sans excès. C’est un vin fin, qui ne se donne pas, mais doit se chercher et se désirer. À cet égard, Dubourdieu a raison de rappeler que la dégustation est à la fois physiologique et esthétique.

Le jugement du bon goût est un objet de connaissance. Il y a une objectivité du beau et du bon, le goût n’est pas qu’une affaire personnelle et subjective. Dans le goût aussi il faut tuer le relativisme qui cherche à faire croire que la vérité n’existe pas, et que chaque homme est son propre sujet.
Certes il y a dans le goût une part sensorielle et émotive, donc subjective, mais il y a aussi une dimension logique et rationnelle, donc objective. La sensibilité et la raison ne sont pas antinomiques ; c’est de leur confrontation et de leur union que se découvre la vérité du goût. C’est la magie du vin, et de la gastronomie, que de partir du particularisme de chacun pour aller vers l’universalité du bon absolu. Heureusement qu’il y a cette universalité du bon goût, sinon les hommes ne pourraient pas se comprendre. Or le propre du vin, dans sa liturgie classique et dans son esthétique, c’est de relier les hommes entre eux ; telle est sa religion.

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