Pourquoi les dictatures ne tombent pas

Vous êtes ici : Accueil > Articles > Pourquoi les dictatures ne tombent pas

jeudi 3 octobre 2019

Surprise des esprits rationnels que de constater qu’il est très rare qu’une dictature soit renversée par sa population. Un régime qui nous paraît odieux, parce qu’il maltraite et tue sa population, parce qu’il provoque une faillite de l’économie, engendrant famines et restrictions, est très rarement renversé. Le Cuba communiste est toujours là et les frères Castro ont réussi à assurer leur succession. La Corée communiste de même et il est légitime de penser que s’il n’y avait pas eu l’intervention américaine de 2003, Saddam Hussein serait toujours le dirigeant de l’Irak. Maduro tient encore le Venezuela, en dépit des coups de boutoir lancés par Juan Guaido et des manifestations qui rassemblent des millions de personnes dans les rues. Qu’est-ce qui assure donc la survie de ces régimes ? Au moins trois facteurs : la sidération pour la servitude, le pouvoir de la force, l’inutilité du soulèvement.

La sidération de la servitude

La liberté est loin d’être une chose naturelle et partagée ; la servitude est davantage appréciée. La servitude retire l’obligation de la responsabilité, elle est donc plus confortable que la liberté. Elle donne une certaine routine, elle évite de se poser trop de questions, elle est moins exigeante que la liberté, déclinée sous toutes ses formes : expression, religion, politique, culturelle, etc. la servitude est réconfortante et apaisante, surtout quand elle est douce et qu’elle ne s’accompagne pas d’une répression trop forte. C’est le nouveau despotisme décrit par Alexis de Tocqueville : « Je vois une foule innombrable d’hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs dont ils remplissent leurs âmes. » Les plaisirs petits et vulgaires suffisent quand la liberté vise toujours à la grandeur et à la magnanimité. Quoi qu’il en dise, quoi qu’il démente, l’homme a une inclination naturelle pour la servitude et préfère se courber aux pieds du maître. C’est la force des tyrans et cela explique qu’ils ne soient que très rarement renversés.

Le pouvoir de la force

Quand bien même certains oseraient vouloir renverser le dictateur, celui-ci dispose de la force militaire et n’hésite pas à s’en servir. Staline éliminait ses opposants politiques, tout comme Ernesto Guevarra et aujourd’hui Maduro. Tant que l’armée tient, le dictateur est certain de rester. Ce qui renvoie à l’analyse d’Étienne de La Boétie dans son célèbre ouvrage De la servitude volontaire. Certes, le dictateur peut ordonner de tirer sur des manifestants, mais encore faut-il que son ordre soit exécuté. L’officier qui commande la troupe comme le soldat qui appuie sur la gâchette sont tout autant responsables de la répression que l’homme qui en donne l’ordre. Les dictateurs tiennent parce qu’il y a en dessous d’eux une kyrielle de petits dictateurs qui organisent la terreur à leur échelle. Rien n’est pire que la bureaucratie pour asseoir un pouvoir jusqu’aux coins reculés du pays. C’est le sadisme des petits chefs et des ratés qui trouvent soudain une justification à leur vie en imposant la répression et les ordres stupides sur ceux dont ils peuvent exercer un pouvoir. Les dictatures sont remplies de ces petits fonctionnaires, gratte papiers et médiocres grisés par le mal qu’ils peuvent exercer sur les autres et qui leur donne l’illusion d’être quelqu’un.

Lire la suite

Thème(s) associés :

Par Thèmes