Les pédagogues et l’utopie pédagogiste

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lundi 3 septembre 2012

Par Stanislas Cieslik, professeur d’histoire.

Jean de Viguerie, dans son ouvrage « Les pédagogues. Essai historique sur l’utopie pédagogique », tente d’expliquer la faillite dramatique du système éducatif actuel. Ce dernier, reposant sur une vision déformée de l’enfant et sur un statut dégradé du savoir, est en opposition flagrante avec l’éducation chrétienne. L’origine du phénomène est ancienne : il prend racine au XVIe siècle, s’appuyant sur une transformation progressive du rôle des pédagogues et des théories que ces derniers tentent de mettre en application. L’auteur remonte à Érasme qui est le « père de la pédagogie utopiste », et nous présente un tableau sélectif de quatorze pédagogues, dont le dernier est Philippe Merieu.

Les pédagogues sont pour la plupart des utopistes qui remettent en cause le bon sens commun : ainsi Rousseau dira que la « lecture est le fléau de l’enfance », Dewey que le silence en classe « empêche les enfants de révéler leur véritable nature ».

Ce court ouvrage permet au lecteur d’être éclairé sur quatorze personnalités qui ont marqué la construction de l’utopie pédagogique moderne, laquelle, derrière ses visages divers et multiples, suit une même logique. L’auteur s’interroge avec raison sur la perception que les pédagogues ont de l’enfant : ce dernier n’est, selon eux, que de la matière ; il n’est capable d’aucune intelligence, il n’a pas d’intellect, « cette capacité » venant seulement plus tard, au fil des années. En fait l’enfant est malléable à volonté ; nous pouvons citer Rousseau qui énonce que l’on « façonne les hommes par l’éducation ». Cette idée n’est pas totalement fausse ; seulement il faut se poser la question du comment, des finalités et de la conception que l’on se fait de la personnalité de l’enfant.

Globalement, ces idées s’accompagnent du refus d’une « intelligence active de l’enfant », celui-ci n’ayant pas de « vertus intellectuelles », ces moyens, selon Aristote, d’énoncer la vérité. Le concept d’intelligence active est remplacé, selon les différents pédagogues, par une pléthore de théories : ainsi dans « l’Émile » de Rousseau, l’enfant va inventer le savoir par ses expériences ; on ne doit pas recourir à l’apprentissage traditionnel basé sur la leçon, ce sont les sensations qui guident l’acquisition du savoir. Plus récemment, Philippe Merieu, le chantre moderne de « l’éducation nouvelle », ignore l’intelligence des enfants.

Le dernier point que nous exposerons est l’opposition, parfaitement perçue par l’auteur, entre l’éducation chrétienne et la « nouvelle pédagogie ». Il est inutile de rappeler l’importance du cadre familial, les parents étant les éducateurs naturels de leurs enfants, et l’école ne devant être perçue que comme un outil pour aider les parents dans leur tâche. De leur côté, les utopistes veulent créer un homme nouveau, ce qui implique la création d’une société nouvelle qui dans sa finalité s’oppose au plan divin. En y réfléchissant bien, on s’aperçoit que les intérêts idéologiques et politiques ne sont jamais loin, et pour Jean de Viguerie l’utopie pédagogique ressemble étrangement « à l’utopie politique ».

Pour conclure nous pouvons dire que l’utopie pédagogique au début du XXIe siècle est en position de force ; actuellement elle prime dans les projets scolaires. Elle est à l’œuvre depuis de longues années, ce qui entraîne de nombreux fruits : « généralisation de l’ignorance et paralysie des intelligences ». Désormais toutefois, le « mal » est identifié, ce qui peut entraîner une réaction de la part des parents qui, avec leur bon sens, refusent le système en confiant leurs enfants à des écoles qui ne sont pas sous l’emprise de l’utopie pédagogique.

En ce début de rentrée scolaire, l’ouvrage de Jean de Viguerie est un bon guide pour aider les parents dans la formation de leurs enfants ; il leur permettra de ne pas tomber dans les pièges de la « nouvelle pédagogie ».

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