Le chocolat

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lundi 9 décembre 2019

« Je suis fou du chocolat… »

Qui n’a pas vécu sous le règne de Giscard n’a pas connu cette réclame où Salvador Dali croque dans une tablette, moustaches tournoyantes, en s’exclamant « Je suis fou du chocolat Lanvin ! » Maison bourguignonne, Lanvin s’est rendu célèbre par ses escargots fourrés à la ganache, subtil rappel de sa région d’origine. Ses boîtes s’étaleront dans tous les centres commerciaux à l’approche des fêtes de Noël, avec les autres produits à base de chocolat que les industriels tentent de nous vendre. S’ils ratent Noël, il leur restera Pâques. Pour ceux qui font des crises de foie rien qu’en regardant les boîtes des différentes marques de produits chocolatés de grande série, il reste possible de s’orienter vers les chocolatiers authentiques, qui sont nombreux. En gastronomie, le moins est l’ami du mieux : mieux vaut peu de produits de qualité, que beaucoup de produits médiocres.

Originaire du Mexique et d’Amérique latine, le cacao a été importé en Afrique de l’ouest par les Européens. Il s’est particulièrement bien implanté en Côte d’Ivoire et au Ghana, qui fournissent près de 60% de la production mondiale du cacao (environ 40% pour la Côte d’Ivoire et 20% pour le Ghana). Le cacao africain est de variété forasteros, qui est originaire d’Amazonie. C’est un cacao rustique et robuste, utilisé dans tous les produits industriels. L’Amérique centrale et caraïbe, Venezuela et Colombie produisent la variété criollos, très minoritaire dans la production, mais qui donne les produits les plus fins et les plus aromatiques. C’est cette variété-là que l’on trouve chez les chocolatiers renommés. Rares sont ceux qui travaillent directement les fèves, la plupart se fournissent chez un grossiste qui leur vend la matière première. Valrhona est l’un des plus renommés de ceux-là, qui depuis 1922 fournit du chocolat haut de gamme aux professionnels et connu des particuliers par le carré offert avec le café. L’entreprise est située dans la Drôme, à Mercurol, non loin du Rhône et de Crozes-Hermitage, ce qui est heureux tant les accords vin rouge / chocolat amer sont judicieux.

Le fleuve est le meilleur allié du chocolat, car il permet de transporter les cabosses du port jusqu’à l’usine. Débarquées à Marseille, les cargaisons peuvent remonter le Rhône jusqu’à l’atelier Valrhona. Deux autres sites fluviaux ont donné des centres chocolatiers importants : Blois et Noisiel avec Poulain et Menier, sur la Loire et la Seine. Les usines Poulain sont toujours un élément central de Blois, avec son château. Quant à celles de Menier, c’est toute une cité ouvrière qui s’y est constituée, aujourd’hui préservée comme site industriel remarquable. Menier est l’inventeur de la tablette, facile à transporter et à partager. Avec Poulain, il a développé une publicité imaginative d’affiches qui continuent d’inspirer par la beauté de leurs traits. Produit de fête et de consommation courante, le chocolat a aussi à voir avec l’histoire industrielle et l’organisation des villes ouvrières. Un temps qui s’est terminé sous le règne de Giscard.

Chronique gastronomique parue dans L’Incorrect.

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