Le Jihadisme d’atmosphère en Europe et au Moyen-Orient

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jeudi 4 mars 2021

Le Proche et le Moyen-Orient ont particulièrement bouillonné au cours de l’année 2020, connaissant des évolutions majeures qui sont trop souvent restées silencieuses. Les accords d’Abraham, les difficultés économiques liées à la chute de la fréquentation touristique, l’agitation de la Turquie, l’axe iranien, autant de choses qui ont contribué à modifier la région. L’orientaliste Gilles Kepel propose une analyse de cette année inattendue dans un essai où il associe le temps court des événements de 2020 au temps moyen de la décennie écoulée. Le prophète et la pandémie (Gallimard, 2021), dont le cahier de cartes central a été réalisé par Fabrice Balanche, analyse principalement l’attitude d’Erdogan, mais propose aussi un concept original d’évolution du jihadisme, dans ce que Gilles Kepel appelle le « jihadisme d’atmosphère ».

Évolution du jihadisme

Il y a peu, mais c’est déjà un autrefois, le jihadisme était structuré et organisé. Il y avait des organisations, des chefs, des ordres et des modes opératoires. Cela permettait l’organisation d’attentats ciblés et organisés, s’appuyant sur des relais et des réseaux. Les frères Kouachi en sont un exemple : leur attaque contre Charlie Hebdo nécessitait une certaine logistique en armement, voiture de déplacement, repérages, lieux de replis, etc. Ce jihadisme organisé est principalement le cas des attentats des années 1990-2010, mais celui-ci a dorénavant évolué vers ce que Keppel appelle le jihadisme d’atmosphère. Désormais, des jeunes désœuvrés agrippent des idées et des sentiments à travers les musiques piochées sur le Net, la lecture de quelques sites, la fréquentation de forum et de discussions en ligne. Ils se radicalisent au contact de ces nuages jihadistes et des rencontres personnelles qu’ils peuvent faire dans leurs cités, décidant un jour de passer à l’acte en faisant usage d’une voiture ou d’un couteau. L’attentat est beaucoup moins organisé et planifié, moins meurtrier aussi, mais plus facile à perpétrer. Une voiture lancée à forte allure dans une foule, des coups de couteau envoyés à la gorge de quelques passants. Ce jihadisme d’atmosphère a changé la façon d’agir des terroristes et donc doit modifier aussi la façon de le contrecarrer. À cet égard, le plan Vigipirate qui interdit le stationnement des voitures à l’abord des lieux publics, notamment des écoles, est obsolète, car cela fait belle lurette qu’il n’y a pas eu d’attentats à la bombe à partir d’une voiture ; il n’y en a d’ailleurs quasiment pas eu en France. C’est donc apporter une solution à un problème qui n’existe pas, car ce n’est pas le mode opératoire des terroristes.

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