La phénoménologie de Michel Henry

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lundi 2 septembre 2013

Une recension d’ouvrage réalisée par Antoine de la Garanderie, professeur de français.

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Philippe CAPELLE (éd.), Phénoménologie et christianisme chez Michel Henry, Paris, Cerf, 2004

L’ouvrage, dirigé par Philippe Capelle et paru en 2004 peu de temps après la disparition de Michel Henry, est un recueil d’articles et d’interventions autour de l’œuvre du philosophe chrétien prononcées (1) au cours de deux rencontres organisées à l’Institut catholique de Paris. Il est composé de neuf articles regroupés en trois parties assorties d’une introduction de Philippe Capelle. Les trois parties, qui témoignent d’une logique de l’ouvrage, font graviter tout à tour trois termes autour du vocable « Phénoménologie » : la première s’intitule « Phénoménologie et vérité » et est constituée de trois articles examinant les possibilités d’une exploration phénoménologique de la « vérité chrétienne », selon une dynamique impulsée par Michel Henry, auteur du premier article ; les deux suivants sont une tentative de dialogue avec ce dernier ; la deuxième, « Phénoménologie et incarnation », est constituée de cinq articles et examine le cas particulier de la question de l’incarnation, un axe majeur de la réflexion du « Dernier henry ». La troisième partie, comprenant un article, traite de la question de la parole dans une perspective henryenne.

Dans un premier article, initialement publié en revue (2) , Michel Henry s’interroge sur la possibilité d’une approche phénoménologique du christianisme. Il rappelle la problématique qui était la sienne : celle de penser une philosophe de la vie dans une perspective non-nietzschéenne. La substitution d’une « phénoménologie de la vie » conduit à penser l’originaire ; c’est là que Michel Henry croisera la réflexion biblique. Le questionnement initial est alors lancé : y a-t-il possibilité d’une approche phénoménologique du christianisme ? D’emblée, ce projet ne pourrait se situer dans le sillage de la phénoménologie « historique », mais serait celle de la « phénoménologie de la vie ». Henry analyse alors un certain nombre de thèmes, comme celui de l’apparaître dans la lumière naturelle, la condition de la donation du phénomène est l’auto-donation. Cette phénoménologie de la vie peut apporter sa contribution à l’intelligence du christianisme et de ses paradoxes.

Le deuxième article est un « dialogue » avec Michel Henry sous la forme d’interrogations posées par son œuvre. Joseph Doré fait retour sur un opus du philosophe, « C’est moi la vérité ». La recension est organisée selon un plan annoncé par l’auteur. Il rend hommage à différents points : celui d’avoir précisé le genre de vérité propre au christianisme et le dégagement opéré du système conceptuel particulier du christianisme. Il s’agit pour lui d’une innovation dans le sens où aucune philosophie n’a pensé la vie. Le christianisme l’a fait connaître (Cf. Prologue de Jean). Le texte se poursuit sur des interrogations fondamentales suscitées formulées sous la forme de questions adressées à Philippe Capelle, puis quelques « réflexions pour le théologien ».

Dans le troisième article, Philippe Capelle se livre à un résumé des recherches de Michel Henry et au dévoilement de problématiques qui y sont liées.

Dans « Le monde à l’envers », quatrième article, Jean Greisch tente de faire dialoguer Heidegger avec la parole biblique.

Dans le cinquième article, Yves-Marie Blanchard, bibliste, commente la lecture de l’Évangile de Jean par Henry et avertit d’emblée son apport de spécialiste, indépendamment de toute question philosophique dans laquelle il ne saurait trancher. Il rappelle le caractère fondateur du prologue de Jean pour la réflexion sur l’incarnation (objet de la deuxième section de l’ouvrage). Un rappel grammatical et sémantique nous amène à considérer la dimension de l’apparaître de l’incarnation dans le texte johannique. Il fonde ainsi les intuitions et les thématiques (auto-donation divine,…) de henryennes dans le texte.

Le titre de l’article d’Emmanuel Falque est indicatif du contenu. À partir de la problématique henryenne issue de la distinction husserlienne entre chair et corps, l’auteur se lance dans une discussion des thèses originales du livre Incarnation concernant la discrimination entre les deux entités comme clé herméneutique et théologique.

Dans « Incarnation et théologie », Jean-Louis Souletie montre que les méditations sur l’incarnation d’un point de vue strictement philosophique ont aussi une valeur dans le domaine théologique.

Dans le dernier article de cette section, Michel Henry propose des réponses à des questions soulevées par ses thèses. Il reprend point par point chacune d’elle et y répond avec précision.

Enfin, Jean Greisch, en un ultime article constituant la seule pièce de la troisième partie consacrée à « Phénoménologie et paroles du Christ » nous livre un commentaire de l’ouvrage « testament » du philosophe, Paroles du Christ.

(1) Rencontres avec Michel Henry organisées à l’ICP les 23 mai 1997 et 19 janvier 2001.
(2) Annales de philosophie de l’université Saint-Joseph de Beyrouth (Vol. 18, 1997)

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