Amélioration du cheptel français au XIXe siècle

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dimanche 30 octobre 2016

Sélection du cheptel français au XIXe siècle.

Les bovins ont une triple fonction : lait, viande et travail. Après avoir fourni leurs années de travail, les bœufs sont tués et débités par les bouchers. La répartition des races selon leur fonction n’arrive qu’au cours du XXe siècle, aidée notamment par la disparition de la traction animale au profit de la traction mécanique. Au XVIIIe siècle, les animaux sont de faibles poids et n’offrent que très peu de rendements, la faute notamment à une nourriture insuffisante. Quelques régions se démarquent : Charolais pour la viande, Flandres pour le lait. En 1780, le cheptel français compte environ 7 millions de tête. Le poids moyen des animaux en France est deux fois inférieur à celui des bêtes anglaises.

Améliorer les races

L’amélioration bovine vient d’Angleterre et du rôle joué par un éleveur désireux de perfectionner les races, Robert Bakewell (1725-1795). Il est un des premiers à faire des croisements pour améliorer les races locales, pour qu’elles soient plus grosses et plus productives. Dans sa ferme du nord de l’Angleterre, il veille à améliorer la nourriture et l’embouche des animaux, constatant que cela les améliore. Il envoie les plus belles bêtes à la reproduction et les autres à la boucherie, pour sélectionner les espèces.

C’est un acte novateur, car c’était l’inverse qui était pratiqué jusqu’alors : les belles bêtes pour la boucherie, les autres pour la reproduction. Il conduit ses travaux sur les bovins, les porcs et les ovins. Deux élèves de Bakewell, les frères Colling, sélectionnent une race de vache issue de la vallée de la Tees, la Shorthorn, connue en France sous le nom de Durham. La nouvelle race sélectionnée se révèle excellente. Elle a un très bon répondant à l’engraissement, elle est précoce (elle peut être abattue au bout de quatre ans, voire trois ans), et elle a de très bons rendements laitiers. Cette espèce se diffuse en Angleterre et en France. Elle est au fondement du cheptel français.

Avec la Révolution et l’Empire la France accumule un grand retard agricole. Les efforts du XVIIIe siècle sont stoppés et la production agricole est faible. Conscient de ce retard, les éleveurs français sont disposés à le rattraper au cours des premières décennies du XIXe siècle.

L’importation anglaise

La Révolution a également amené de nombreux aristocrates à fuir en Angleterre. Au cours de cet exil forcé, ils ont découvert les pratiques agricoles anglaises et les méthodes de sélection bovine, qu’ils sont décidés à ramener en France pour les appliquer sur leurs terres. C’est à l’époque de la Restauration que se diffusent ces pratiques, époque fortement marquée par une anglomanie culturelle prononcée. Vers 1840, 100 hectares en Angleterre nourrissent 75 bêtes à cornes contre 20 en France. De plus, le poids moyen des bêtes en Angleterre est de 277 kg contre 175 kg en France.

Pour conjurer ce retard, il est décidé d’importer des animaux anglais pour développer le cheptel français. Cela commence par les chevaux (pur-sang anglais) et concerne ensuite tous les autres animaux. Pour les bovins, c’est le Durham qui est importé. Ils arrivent en 1836 à l’école vétérinaire d’Alfort. On estime que 300 bêtes ont été au total importées. Des vacheries sont créées pour produire des animaux purs, qui sont ensuite envoyés dans les régions pour s’accoupler avec les vaches.

Les concours agricoles

En 1843 est créé le concours de Poissy, dont la première édition se tient en 1844. L’objectif est de créer une émulation chez les paysans en récompensant les meilleures bêtes, avec des prix importants et des médailles. Pour qu’il y ait concours, il faut définir des critères indiscutables : physionomie de l’animal et poids. Les concours se doivent de réunir beaucoup de monde pour susciter une émulation nationale. Les concours de Poissy se déroulent de 1844 à 1867, année où ils sont remplacés par ceux de la Villette, où se trouve les abattoirs de Paris.

Les concours se tiennent au début de la Semaine Sainte. D’une part parce que c’est la meilleure période pour les animaux (fin de l’hiver début du printemps), d’autre part parce que c’était autrefois la coutume que de primer un animal gras qui pouvait être abattu pour le jour de Pâques.

Les Durham remportent la plupart des prix, ce qui suscite le grand mécontentement des éleveurs. En 1850, des modifications sont apportées. On sépare les Durham des races françaises, au motif que les premiers sont pour la viande et les secondes pour le trait. Est créé également un concours de reproducteurs. C’est la période où le Durham est l’espèce la plus côté, le prix de vente d’un Durham étant de 2 325 francs contre 475 francs pour un taureau de race française.

En 1856 est créé le concours universel agricole de Paris, à l’occasion de l’exposition universelle. Celui-ci se tient au palais de l’Industrie, au rond-point des Champs-Elysées. Il devient ensuite le concours général de Paris, qui se tient encore chaque année lors du salon de l’agriculture.

Vers l’individualisation des races françaises

Si le Durham est encore l’espèce la plus importante, cela change à partir des années 1880. Les éleveurs français essayent d’améliorer les races locales en opérant des sélections. Le Durham est attaqué par des opposants de plus en plus nombreux. On lui reproche notamment de ne pas être assez polyvalent. Il finit par laisser sa place aux races locales et par disparaître du cheptel français dans les années 1910. Le Finistère est le dernier département où il est produit en nombre, mais là aussi il est remplacé par la race Armoricaine. À partir de 1880, c’est la sélection dans l’indigénat qui se développe et qui triomphe.

Le succès de cette sélection est tout à fait tangible. En 1862, le poids moyen des bêtes est de 324 kg, allant de 117 kg en Corse à 470 kg en Seine-et-Oise. Dans les départements, s’il y a des races dominantes, il y a malgré tout une grande hétérogénéité et de nombreuses races peuvent être présentes.

À l’orée du XXe siècle, le cheptel français s’est largement modernisé. La vache est traitée comme un outil de production, au même titre que les outils de l’industrie. On comprend mieux son fonctionnement, l’importance de la nourriture qui lui est donnée et les opérations à mener pour assurer sa sélection. Cela a permis à la France de combler son retard et de développer une agriculture moderne. Toutefois, les progrès accomplis entre 1780 et 1900 ne sont rien au regard des progrès et des évolutions de l’agriculture française au cours du XXe siècle.

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